Au début de l’année 2023, le Parlement européen a approuvé la proposition de directive de la Commission européenne qui prévoit un nouveau régime visant à prévenir l'utilisation abusive d'entités écrans dans le seul but de bénéficier d'avantages fiscaux (communément appelée « ATAD 3 » ou « Directive Unshell »).
La proposition de directive ATAD 3 introduit des indicateurs de substance minimale en vue d’empêcher l’obtention de certains avantages / régimes fiscaux reposant sur des traités ou directives de l’UE, tels que l’exonération de retenue à la source sur les dividendes, les intérêts et les redevances.
Contrairement à la directive Pilier 2, la proposition de directive ATAD 3 ne se limite pas à des groupes multinationaux et nationaux dont le chiffre d'affaires dépasse les 750 millions d’euros. Par conséquent, elle concernera de nombreuses petites et moyennes entreprises établies au sein de l’UE et augmentera le volume et les coûts administratifs.
Si elle est adoptée, la directive ATAD 3 devrait avoir un impact significatif, en particulier sur les structures de holding européenne.
La proposition de directive ATAD 3 se destine aux entreprises dont la résidence fiscale est située dans un État membre de l’Union européenne et qui n’exercent aucune activité économique étant présumées dépourvues de substance minimale.
Si une société réunit les trois critères (appelés « passerelles ») suivants, elle est considérée « à risque » et sera tenue de respecter certaines règles de communication d’information dans sa déclaration fiscale annuelle :
Si une entité est dépourvue de substance selon les trois indicateurs susmentionnés ou ne présente pas les documents justificatifs adéquats dans sa déclaration de revenus annuelle (par ex., des informations sur ses locaux, le nombre de salariés et de collaborateurs, les comptes en banque actifs), elle est alors présumée être une entité écran.
Toutefois, une entité est en droit d’invoquer le renversement de cette présomption, tel qu’indiqué ci-après.
En fonction d’une analyse individuelle (à savoir qu’elle ne sera pas menée à bien au niveau d’un groupe, le cas échéant), certaines entreprises bénéficieront également d’une dérogation et seront libérées des obligations de déclaration si (i) leur activité principale consiste à détenir des participations dans des sociétés opérationnelles dans le même État membre, tandis que leurs bénéficiaires effectifs ont également leur résidence fiscale dans le même État membre, ou si (ii) elles ont leur résidence fiscale dans le même État membre que l’actionnaire ou les actionnaires de l’entreprise ou l’entité mère ultime. En outre, il est attendu que certaines entités (par ex., certaines entreprises cotées, certaines entreprises financières réglementées et certains types de fonds d’investissement) bénéficient également de cette exonération.
Les États membres doivent prendre des mesures pour permettre aux entreprises présumées être dépourvues de substance minimale de prouver le contraire, en fournissant des preuves supplémentaires des activités commerciales qu’elles exercent pour générer leurs revenus.
À cette fin, les entités doivent fournir les éléments de preuve supplémentaires suivants : (i) un document permettant de déterminer la logique entrepreneuriale sous-jacente à l’établissement de l’entité dans l’État membre où l’activité est exercée ; (ii) des informations sur le profil des salariés à temps plein, à temps partiel et des travailleurs indépendants.
L’État membre doit tenir compte de la demande de renversement de la présomption dans un délai de neuf mois à compter de la soumission de la demande, laquelle sera réputée acceptée à défaut de réponse de l’État membre au terme de cette période de neuf mois.
Si un État membre estime qu’une entreprise a renversé de manière satisfaisante une présomption de manque de substance, il devrait pouvoir adopter une décision certifiant que l’entreprise est dotée de substance minimale à des fins fiscales. Cette décision devra demeurer valable pendant une période maximale de 5 ans.
Si l’entreprise ne parvient pas à renverser cette présomption, elle ne sera pas en mesure d’obtenir un certificat de résidence fiscale dans l’État membre de sa résidence au sein de l’UE. En termes pratiques, cela signifie que l’entreprise ne pourra pas bénéficier d’une quelconque convention visant à éviter la double imposition signée par l’État de résidence de l’entreprise ou de directives de l’UE (par ex., la directive « Mère-filiales » et la directive « Intérêts et redevances »).
Il existe des difficultés manifestes à trouver un consensus entre les États membres de l’UE sur certaines des principales dispositions de la directive Unshell, la version finale demeurant incertaine et la date de sa divulgation encore inconnue. En l'absence d'unanimité, il est possible que les versions les plus récentes de la proposition fassent elles aussi l’objet de modifications.
Néanmoins, à la date de cette publication, aucun report officiel quant à la date d’entrée en vigueur (à savoir, le 1er janvier 2025) n’a été encore annoncé - sachant qu’il faudra, à compter de cette date, tenir compte des délais de transposition dans l'ordre juridique de chaque État membre de l’UE.
À cet égard, il convient de noter qu’à l’occasion de la dernière conférence de l’IFA, l’Association fiscale internationale, qui s’est tenue à Amsterdam, des niveaux d’optimisme élevés ont été enregistrés vis-à-vis de la directive Unshell, un représentant de l’actuelle Présidence espagnole ayant, du reste, indiqué qu’un accord relatif à cette initiative constituait une priorité et que son objectif visait à atteindre un alignement politique sur cette matière jusqu’à la réunion du Conseil ECOFIN qui se tiendra au mois de novembre 2023.
Malgré les incertitudes, ce qui est sûr c’est que si elle est approuvée, la directive ATAD 3 aura un impact sur les pierres angulaires du système fiscal et des garanties des contribuables, comme la charge de la preuve. En effet, dans le cadre de l’application des dispositions anti-abus générales ou spécifiques actuelles, il incombe à l’administration fiscale de prouver que l’entreprise est une entité écran. Toutefois, avec l’entrée en vigueur de la directive ATAD 3, le contribuable devra lui-même prouver qu’il n’est pas une entité écran au sens des critères de la directive.
Outre la proposition de directive ATAD 3, la Commission européenne travaille également sur un nouveau paquet fiscal visant à limiter davantage l’utilisation de sociétés écrans et le montage fiscal abusif.
Ce paquet comprend l’initiative « Securing the Activity Framework of Enablers », communément appelée SAFE (en complément de la proposition de directive ATAD 3, pour lutter contre les facilitateurs qui créent des structures en utilisant des sociétés écrans non communautaires).
Dans un autre contexte, la proposition de directive FASTER est en préparation et vise à introduire un nouveau système de retenue à la source au sein de l’UE afin d’éviter les abus de droit fiscal relatifs aux retenues à la source. La Commission européenne prévoit d’adopter dans les prochains mois une proposition de directive pour une procédure d'exonération de la retenue à la source au sein de l’UE plus efficace.
Les entités pouvant être concernées (à Madère, au Portugal ou à Malte) devront analyser s’il existe une éventuelle obligation de report en vertu de la proposition de directive ATAD 3 - il convient de noter, à ce sujet, que les structures mises en place avant l’entrée en vigueur de la proposition de directive ATAD 3 seront affectées.
À la suite de cette analyse, et afin d’éviter tout risque inutile pour les investisseurs, les entreprises pourront avoir à reconsidérer ou simplifier des structures sociétaires potentiellement redondantes à travers des restructurations impliquant des fusions, voire la liquidation d’entreprises.
Chez NEWCO, nous avons de l’expérience dans le suivi de la conformité des structures des clients à travers le contrôle des conditions substantielles des entreprises constituées à Madère, au Portugal et à Malte.
Une caractéristique intéressante de la directive Unshell, en particulier, réside dans le fait qu’elle fournit plusieurs indicateurs de substance d’ores et déjà pris en compte dans nos recommandations pour les entreprises qui opèrent dans le cadre du Centre international des affaires de Madère, tels que :
Bien que les entreprises du Centre international des affaires de Madère devraient déjà respecter certaines des conditions de la directive Unshell, une analyse au cas par cas est recommandée. En ce sens, nous pouvons vous apporter notre aide quant à :